Eric Benqué : « « L'imaginaire autour du parcours de l'eau structure le dessin des meubles[*] : ils sont poreux. Jamais ils ne retiennent ni n'entravent le chemin de l'eau. Elle les traverse tous et chemine partout librement. Ils sont également traversés par l'air et la lumière, par le regard, par la végétation... Le mobilier ne subit aucun traitement. Le bois va griser, prendre des reflets argentés ; l'acier va s'oxyder. Les meubles vont progressivement se fondre dans le contexte. » »
La collection de meubles conçue par le designer Eric Benqué pour LE PARTAGE DES EAUX est en soi un élément d'identification fort du parcours. Installés le long du GR7, bancs, plateformes et abri–point de vue[*] scandent le parcours entre deux œuvres ou Mires, invitant à une halte récréative ou contemplative face à des horizons qui s'ouvrent à l'infini sur les paysages abruptes du versant méditerranéen ou le relief doucement vallonné côté atlantique. De dimensions généreuses, ils n'imposent aucun usage mais offrent une grande liberté aux usagers qui peuvent laisser libre cours à leur imagination et leurs envies. Le designer a travaillé ici avec du châtaignier local afin de mettre à profit les multiples qualités de ce bois connu pour sa résistance naturelle aux conditions climatiques extrêmes, montrant ainsi que cette essence locale est une ressource d'avenir.
Un designer[*][*] : c'est quoi ?
GLOSSAIRE Design : "Touchant à l'esthétique industrielle, l'architecture intérieure, etc., le design vise une symbiose entre l'homme et son environnement fabriqué et construit, une harmonie entre la forme et la fonction des créations utilitaires. Le designer conçoit des projets d'objets réalisés industriellement en série ou au contraire uniques pour un lieu donné, abolissant alors la frontière entre l'art et le design comme art appliqué."
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Né en 1971, Éric Benqué est diplômé de l'École Nationale Supérieure de Création Industrielle, auditeur du Collège des Hautes Etudes en Environnement et Développement Durable et lauréat 2013 du Prix pour l'intelligence de la main de la Fondation Bettencourt-Schueller.
Son travail de designer est varié. De luxueuses réalisations côtoient ainsi des collaborations avec des artisans en Bourgogne, en Inde ou au Mali, des marchés publics alternent avec des projets plus éphémères. Mais chaque fois, la question de l'adéquation du projet au contexte dans lequel il s'inscrit est centrale. Ses collaborations régulières avec des architectes nourrissent sa pratique et lui permettent de développer une attention particulière à la dimension spatiale du projet de design. La recherche de constructions économes en matière, la simplicité de la mise en œuvre et des solutions formelles sont autant de constantes qui traduisent dans son travail le souci d'une proposition juste, en accord avec son époque. Cette quête de simplicité et d'harmonie s'allie à une exigence des matériaux et la conscience aigüe de la responsabilité du designer à l'égard de l'environnement.
Eric Benqué : « « L'idée de cette proposition est venue en prêtant attention au contexte : à ce qu'il y a sur place, tant en termes de ressources naturelles que d'activités humaines. En m'appuyant sur mes observations et mes découvertes, j'ai voulu offrir la possibilité aux visiteurs de s'arrêter dans le Parc, de s'y immerger : les meubles sont un trait -d'union. Il y a aussi l'inscription dans le projet global, et dont le fil conducteur était pour moi le chemin de l'eau : ces meubles ont un rapport particulier avec cet élément : ils parlent d'écoulement et de traversée, ils n'interfèrent pas dans son parcours ni jamais ne la retienne. Plus largement, ils cherchent à ne faire écran à rien. C'était pour moi un des enjeux majeurs de ce projet : intervenir sans perturber ce que l'on est venu admirer. [...] J'ai fait beaucoup de croquis, puis des maquettes en bois, puis des modèles numériques. La question est toujours celle d'une intuition, d'une vision plus ou moins nette de la création, puis de sa confrontation ensuite avec le réel. » »
FOCUS / Le bois de châtaignier
Spontané, vigoureux, naturellement résistant car riche en tanin, le bois de châtaignier est utilisé notamment pour les charpentes, la parqueterie, les menuiseries, les piquets, le bois-énergie et la trituration. Il est pourtant aujourd'hui sous-valorisé : en Ardèche, 1% seulement de l'accroissement annuel naturel des forêts de châtaigner est commercialisé. Il existe ainsi localement un réel potentiel pour le développement d'une filière de qualité autour du bois de châtaignier. La demande croissante de cette essence renforce aujourd'hui l'intérêt économique de la valorisation forestière des châtaigneraies des Monts d'Ardèche.